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La mélodie du travail

  • Photo du rédacteur: Captain Emeline
    Captain Emeline
  • 21 oct. 2018
  • 2 min de lecture

Dernière mise à jour : 12 mars 2020

La bibliothèque murmure à mes oreilles la mélodie du travail :


des pages se froissent,

des sacs s’ouvrent,

des respirations soupirent,

des portes crissent ou se claquent,

des pas montent les escaliers ou trainent sur le lino,

des doigts frappent les claviers,

des chaises grincent ou croassent sur le sol,

quelques mots sont échangés,

un rire est étouffé,

des stylos roulent sur la table,

les anneaux du classeur claquent en s’ouvrant,

claquent en se refermant,

des jeans glissent dans la marche,

le bouchon du surligneur fait pop en se retirant,

un enfant passe en lâchant un mot un peu trop volumineux,

le code barre bipe,

la climatisation souffle en continu,

la pochette plastique est ouverte et la feuille introduite crisse,

la trousse zipe,

les clefs grelottent,

la gomme frotte,

l’homme souffle,

... et dehors, le silence me parvient.

Le soleil perce à travers la fenêtre.

Traitre silence. Traitre soleil.

Dans ma tête, les mots se bousculent. Sur ma feuille, les mots s’évaporent.

Je dois travailler.


Envie d’écrire tout autre chose.

Je tourne dans tous les sens la situation.

Envie de créer.

Envie de partir en voyage dans une histoire épique, romantique, inattendue et colorée.

Envie de rester immobile, de respirer.

Envie de vivre seulement par le filet d’air qui vient du monde pour alimenter mon intérieur. Envie de ne plus être au monde.

Envie d’être le monde.

Envie de ne plus agir.

Arrêt sur image.

Pas de souffrance, pas de vagues, pas de vie.

Eternité, atemporel. Capturé, libéré. La pensée s’étiole, elle ne tient qu’à un fil, elle s’éteint. Le silence.


Les bruits. La bibliothèque respire. « Il est trois heures, trois heures moins le quart ». Déjà ? N’ai-je pourtant pas arrêté le temps ? Ne l’ai-je pas retenu dans mon silence. Non. Il n’en a rien à faire de moi le temps. Il passe, il s’échappe. Il est intarissable. C'est une musique au débit régulier et aux flots inaltérables. Son rythme me nargue. Son rythme m’accompagne. Il m'offre ses pépites, ces moments particuliers dont les harmoniques vibrent à la perfection. Il me tue par son étirement, ces longs adagio sans fin...

Ne sois pas si dure avec moi, M. Le Temps. Je sais que je te fais souffrir par mes retards, mes délais, mes arrêts, mes courses, mes impulsions, mes retours en arrières, mes sauts en avant, mes compressions et mes distensions. Souffre-tu autant que moi ?

J’aimerai que nous soyons amis un jour. J’aimerai te dire : merci d’être passé, fidèle Temps. Alors je trouverai la paix et le repos, sous ton aile. Je ne dirai plus « Merci Eternel », mais « Merci M. Le Temps », en pensant à mon Dieu. L’éternel est vertical mais le temps est horizontal, et moi je me sens écartelée. Tu es le pilier, tu es le chemin. Tu es l'accord parfait majeur, tu es la mélodie. Je suis capturée, libérée dans cette musique.

Et maintenant, c'est le temps. Le temps où

je dois travailler.




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